Jolene E. Baker - Will you be there

Si vous me demandiez de vous raconter ma vie je vous dirais qu'elle a réellement commencé peu après mes dix-huit ans. Quoi que les deux, trois années qui ont précédées cet anniversaire n'était pas mal non plus. Bref autant commencé du début.

Je suis née à Buenos Aires. Je n'en ai pas gardé un souvenir impérissable puisque mes parents ont quitté l'Argentine j'avais tout juste 6 mois. Mon père est architecte, il était venu en Argentine afin de superviser un gros chantier. Ma mère faisait partie du cabinet d'architecte argentin avec lequel il collaborait.  Un vrai coup de foudre. Deux mois après ma mère était enceinte. Non pas de moi de mon frère aîné. Mon père s'est fait transférer en Argentine et ils se sont installés ensemble. Santiago est né et quelques mois après sa naissance ma mère tombait enceinte de nouveau. Cette fois ci de moi.  Mais avec deux enfants mon père regrettait de ne pas pouvoir nous donner tous les avantages d'une éducations aux États-Unis.  Alors ils ont quitté l'Argentine, ma mère avec regret mais elle pensait que nous aurions plus de chances en Amérique. Direction Detroit.

C'est donc à Detroit que j'ai grandi.  Entouré de Santiago, Leandro et Luca. Et oui trois frères. Ma mère aurait bien voulu une seconde fille mais après quatre enfants elle s'était dit qu'il était temps de s'arrêter là. C'est elle qui nous a élevé, mon père travaillait beaucoup. Schéma classique. Famille classique. Notre enfance se passa sans soucis. A l'adolescence cela se compliqua un peu. Une petite crise passagère dirons nous. Quoi que passagère ce n'est peut être pas ce que ma mère dirait. Je crois que je lui ai plutôt faire vivre un enfer. Je sortais sans prévenir, j'avais des petits copains, je fumais, je ne travaillais plus à l'école. Une bonne crise d'ado quoi. Si bien que l'été de mes dix sept ans ils m'envoyèrent à Blossom Hills chez ma tante, histoire de m'éloigner de mes mauvaises fréquentations comme ils disaient.

J'avais un peu peur mais finalement la campagne ce n'était pas si terrible. Il y avait quand même un ou deux bars, des jeunes qui voulaient faire la fête et quelques mecs mignons qui essayaient de me séduire. Finalement je ne passais pas un été si terrible. Je faisais la baby sitter histoire de m'occuper et de gagner un peu d'argent et j'arrivais quand même à m'amuser. Quand je rentrais à Detroit ma mère se réjouissait de cet été qui m'avait assagi. Et c'est vrai qu'en fait être un peu séparé d'eux ça m'avait fait du bien. Parce que du coup j'étais contente de les retrouver. Le répit n'a été que de courte durée. Quand un mois et demi plus tard j'ai dû leur annoncer que j'étais enceinte...ça n'a pas été facile. Et encore ça aurait pu être pire ils auraient pu me répudier pour avoir eu un enfant hors mariage. Ma mère s'est contenté de pleurer, mon père voulait absolument savoir qui était le c****** (je vous fait grâce des insultes) qui avait fait ça à sa fille, Santiago m'a traité de fille facile, Luka m'a proposé de m'accompagner pour l'avortement et Leandro a été le plus gentil, le seul à s'intéresser à ce que je ressentais en fait. Bref ça a été terrible. Pire encore quand j'ai décidé de garder l'enfant. Toute seule. Je refusais d'appeler le père de mon bébé. Déjà d'une parce que je n'avais pas gardé son numéro. Et ensuite parce que lui et moi ça n'a été qu'une histoire d'une nuit et que je ne voulais pas lui imposer ça.  Donc j'ai fait ce que j'avais à faire.

Il fallait que je trouve un travail et vite. Et un travail qui me permette de passer le plus de temps possible avec mon bébé puisque je n'aurais pas vraiment les moyens de payer une nounou. Alors j'ai fait en accéléré une formation de boulangère, pendant ma grossesse.  J'ai passé mon diplôme un mois seulement après avoir accouché d'Evy. Et ensuite j'ai commencé à travailler à ses trois mois. Je me levais à deux heures du matin, elle restait avec ma mère jusqu'à 9h et je la récupérais à 11h à la crèche en sortant du travail. Autant vous dire qu'heureusement que c'était un bébé facile, qui dormait beaucoup parce que sinon je ne sais pas comment j'aurais tenu le choc.

Je me suis installée dans mon propre appartement Evy avait un an et elle commençait à marcher. Ce n'était pas toujours facile mais j'étais heureuse. L'enfance d'Evy se passa sans soucis, nous étions très fusionnelle toutes les deux. Trop peut être. Pas de place pour un homme. Peu de temps libre. C'est peut être pour ça qu'à l'adolescence elle a explosé. En fait elle s'est simplement mise à être...comme moi à son âge. Plus de travail en cours alors qu'elle était bonne élève, des petits copains, de amis que je n'aimais pas. Il y avait de plus en plus de conflits entre nous. A tel point que nous n'arrivions plus à parler. Alors le mois dernier j'ai pris une décision. On allait partir s'installer à Blossom Hills et j'allais lui présenter son père. Enfin j'allais annoncer à son père qu'il avait une fille de dix sept ans. Une fille en complète rébellion dont je ne savais plus quoi faire. Je n'ai rien dit à Evy. Elle ne sait pas qu'on est venu pour qu'elle rencontre son père. Elle croit que j'ai juste voulu l'éloigner de Detroit en m'installant ici. Je sais qu'elle n'aime pas cet endroit. Mais je crois que c'est ce qu'il y avait de mieux à faire pour elle...