[Abdie] Sometimes I feel like all I ever do is..

Sometimes I feel like all I ever do is
Find different ways to word the same, old song

Les Bardburry

Il sait pas pourquoi ça le démange comme ça, ça le prend aux tripes et que ça lui laisse une sensation écoeurante d’avoir encore fait les choses de travers, mais il peut pas s’en empêcher. Le je-m’en-foutiste prit en traitre par un sursaut d’intérêt qu’il ne se connaît pas et qu’il gère, de toute évidence, très mal, pour ne pas dire que c’est carrément chaotique. C’est de sa faute, surement, parce que c’est toujours plus facile de rejeter la responsabilité sur les autres, mais en l’occurence il peut pas s’empêcher de trouver sa pensée légitime; si elle était jamais venue au monde, Eddie aurait jamais eu à gérer quelqu’un, en plus de sa propre personne. Et on peut dire qu’il a réussi, on peut l’applaudir le bougre, avec ses années cumulées à tout foirer avec brio, son incapacité à terminer les choses qu’ils commencent et son besoin pathologique de venir foutre son nez là où il devrait pas, seulement parce qu’il s’y est senti forcé. Elle a rien demandé, c’est certain, parce qu’Abbie ne demande jamais rien de toute façon, un peu comme lui et sur ce coup on peut bien dire qu’ils se ressemblent, mais Eddie non plus il a jamais demandé ce qui lui tombe sur le coin de la gueule. Parce qu’Eddie il pose pas de questions, il supplie personne et, surtout, il réfléchit pas avant d’agir sauf que jusqu’ici il se croyait être le seul des Bradburry assez con pour se jeter en héros sur les pavés de la justice, sans penser une seule seconde à son avenir. Non. Il a fallu qu’Abbie déraille, qu’elle se montre aussi douée que lui pour rater les choses et c’est ça, ce fait tout particulier, qu’Eddie n’arrive pas à digérer. Que sa soeur, en qui il a placé tant d’espoirs et d’autres choses - même si c’est plus inconscient de sa part que volontaire -, soit capable de balayer son avenir et de mettre en péril ses rêves à lui, transféré sur elle, pour .. Pour quoi au juste ? Ses âneries d’écologie à la con ? Un mec ? Si seulement. Avec Abbie on est jamais sûr de rien. Tout ce qu’il sait c’est que maintenant qu’il a goûté au rôle de frère aîné, Eddie se sent plus trop capable de revenir à la normal et de la laisser faire sa vie, ses erreurs. Maintenant qu’il a mis les pieds dans son monde, dans cet univers dont il se voyait toujours les portes fermées à son nez, il peut plus tourner les talons et son regard, jusque-là constamment rivé sur les courbes féminines lui passant sous le nez, est rivé sur les pas de sa soeur. Sans savoir si c’est pour l’empêcher de tomber une nouvelle fois, ou justement attendre qu’elle morde la poussière pour lui mettre la tête dans la boue dans laquelle elle patauge.. Dans laquelle l’entrainent ces types qu’elle fréquente et qu’Eddie peut pas voir, même en photo ou de loin. Abbie vaut mieux que ça, tellement. C’est peut être là qu’il se trompe; elle vaut ce qu’elle vaut et il ferait mieux d’arrêter de vouloir la mettre sur un putain de piédestal et l’accepter comme elle est. Pleine de défauts, comme son abruti de frère aîné. Mais Eddie veut pas, il peut pas se dire qu’Abbie est juste une fille comme les autres, parce qu’il lui veut du bien, en s’y prenant mal et que son avenir à elle il se trouve ailleurs, dans une ville plus grande pour de plus grands projets. Alors il fait comme ce grand frère qu’il est en train de devenir, l’emmerdeur de base, celui qui vous étouffe jusqu’à vous faire craquer et il jette un oeil mauvais sur la silhouette qui se dessine dans le parc, alors qu’il se retourne pour admirer deux secondes il ne sait trop quoi.

C’est pas un grand adorateur de la nature, mais se perdre dans le parc après les journées à fouler la merde que les habitants laissent derrière eux, ça le détend. Ça lui laisse entrevoir que dans tout le bordel environnant, y a toujours quelque chose d’agréable, de sympa, qui le détend assez pour oublier le bouton qui clignote à sa cheville, sous les pantalons trop larges qu’il s’échine à porter alors que ce n’est plus la mode depuis des années. Pour ce qu’il en a à foutre de la dernière nouveauté en matière de fringues.. Mais le je-m’en-foutiste s’étouffe bien vite dans l’oeuf quand une deuxième silhouette se détache, trop près de la première qu’il a reconnu sans vraiment faire d’effort. Comme quoi, les liens du sang sont peut être aussi forts qu’on le dit. Alors il sait pas trop pourquoi, mais Eddie voit rouge et il réduit la distance en grognant un peu, ours mal-léché qui s’apprête à faire un festin. « Qu’est-ce que tu fous encore avec ce merdeux ?! » Il gueule, plus qu’il ne parle et pas seulement parce qu’il y a encore une sacrée distance entre eux, alors qu’il s’empresse de rejoindre Abbie, qui s’attend peut être pas forcément à découvrir son frère dans cet état. Eddie s’énerve peu, il montre les dents et il râle beaucoup, mais jusqu’à maintenant ses tempes n’ont jamais battu la cadence de son rythme cardiaque endiablé, comme leur père quand ses gosses ont fait une énorme bourde. Bourde pour laquelle Eddie aurait vendu sa soeur, sans hésitation, pas comme aujourd’hui. La main tendue pour désigner le jeune homme qui déclenche cette soudaine couleur pourpre sur son visage, Eddie se veut menaçant mais il se devine plutôt pitoyable. « T’étais encore à une de ces réunions à la con avec ta bande de décérébrés ? » Il ignore s’il est plutôt soulagé d’avoir croisé le chemin d’Abbie, de manière fortuite, ou si ça le gonfle plus qu’autre chose, mais il lui fait déjà signe, de manière autoritaire, de se mettre en marche. « Viens, je te ramène à la maison. » Et il troque son ton détaché habituel pour un peu de hargne et un regard noir. Il est pas méchant, en général, mais Eddie a la rancune tenace et il peut pas s’empêcher de se dire que c’est à cause de ces abrutis qu’il en est là ou, plutôt, que c’est à cause d’eux que sa soeur aurait pu en être là. Et ça, rien que ça, ça lui fout les nerfs à vif, plus qu’il ne l’aurait souhaité.

Code par Fictifs-Therapy

Sometimes I feel like all I ever do is
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Les Bardburry

Il sait pas d’où ça lui vient ce besoin de jouer le frère responsable, à s’endormir avec l’angoisse au ventre, à se poser des questions, à s’inquiéter de savoir à quoi Abbie peut jouer, pourquoi elle a laissé les barbies de côtés pour lutter pour des causes qui lui échappent encore. Sa soeur est une inconnue. Merde, à quel moment a-t-il laissé une gosse de cinq ans, encore fascinée par tout ce qu’il pouvait bien lui raconter, pour retrouver une jeune femme qui prend des décisions sans lui, qui vit une vie à côté de laquelle il ne fait que passer. Elle affronte la vie les yeux fermés, fonce dans le tas et se moque des bleus qui peuvent marquer son être, alors qu’il se met à trembler au moindre croisement de rue. C’est ça devenir un adulte responsable ? Craindre pour sa santé à chaque pas de fait ? Si oui, il préfère encore redevenir l’adolescent insouciant qui faisait des cheveux blancs à sa mère et hurler son père dans la cuisine pendant des heures, des jours. Peut être que c’est pour ça qu’il se met à se ronger les ongles quand il jette un regard sur sa petite soeur; ses parents ont plus besoin de l’engueuler, lui, pour lui remettre les idées en place, alors il faut bien qu’il passe sa frustration d’être un adulte aux yeux des siens, en s’en prenant à Abbie. Mais c’est plus une enfant, c’est une adulte et elle a plus besoin que son frère s’intéresse à ses histoires pour la protéger, il l’a bien compris. Pourtant c’est bien ça qui le prend aux tripes, ce sentiment bizarre qu’il désire fortement qu’Abbie ait encore besoin de lui, même si au final ça n’a jamais réellement été le cas. Y a l’espoir, fébrile, qui lui fait bouillir le sang; celui qu’elle comprenne qu’au final il a juste besoin de se sentir utile, de savoir que les sacrifices qu’il a fait ces derniers mois ne sont pas rien, qu’ils comptent.. peut être pour qu’elle comprenne que c’est sa manière de signaler qu’il a pas été le frère qu’elle aurait sans doute voulu, mais qu’aujourd’hui il est près, qu’il a accepté le fait de ne plus être seul, de ne plus être juste lui et que, quelque part et de manière plus ou moins réelle, on dépend de lui. Tu parles. Faudrait qu’il arrête de rêver et l’image qui s’imprime sur sa rétine lui met une baffe suffisamment puissante pour le ramener à la réalité. « Haha, t’es hilarante. T’as du bol que j’l’ai oublié le café, crois moi. » Il sait pas d’où il sort, ce vieux ton paternaliste, un brin dégueulasse qui lui laisse un arrière-goût amer sur la langue. Il aime pas ce qu’il est en train de devenir; une version raté, un peu flou, de son père, à la différence qu’il a pas son autorité et qu’il l’aura jamais, de toute façon, face à Abbie.

Et c’est injuste, parce qu’il lui a jamais rien demandé, ou même dis sur ses intentions, alors il sait qu’il a pas se montrer aussi virulent avec elle. Eddie sait juste pas pourquoi, mais il en a sacrément besoin à cet instant. Il jette un regard sur Johan - ou « Jo » vu qu’il semble que cet abruti et sa soeur soient plus intime qu’il n’y paraît, du moins c’est ce qu’il s’imagine et rien que ça ne fait qu’accentuer un peu plus sa mauvaise humeur palpable. Regard noir, il finit par reporter son attention sur Abbie, les dents serrées. « Oui, j’y suis obligé, surtout quand il s’agit de ces abrutis qui mettent en danger ton avenir et ta sécurité! Il se passe la main sur le visage, irrité. Si tu choisissais mieux tes fréquentations, t’en aurais des amis, des vrais, pas ces paquebots qui pensent qu’à leur tronche. » L’hypocrite. Au vu de ses propres amis, Eddie est surement le dernier qui puisse s’octroyer le droit d’intervenir sur ces sujets-là. Il lève la main, pas pour l’abattre sur elle, mais pour attraper son bras, sans trop de pression, histoire de la ramener un peu vers lui, dans l’optique illusoire de la remettre sur le chemin, celui de la maison ou de la raison.. À ce stade-là, c’est un peu la même chose. « Ouais.. Et on voit ce que!a donne quand tu te gères toute seule. Tu te laisses embrigader par deux trois abrutis qui te font les beaux yeux. Je te pensais plus maligne que ça, Abbie. » Il la lâche, il serait pas capable de la retenir de toute façon, ni contre sa volonté à elle ni pour se sentir un brin supérieur. « Non, visiblement t’es pas assez grande. J’aurais du mieux te surveiller. » Le regard plongé dans celui de sa soeur, Eddie sait bien que son attitude l’a mené trop loin, que dans la famille si on a beau éviter les scandales autant qu’on peut, une fois que le sang se met à bouillir, il faut qu’on laisse exploser la chaudière, sinon c’est foutu pour des mois. « J’agis comme ça parce que t’es une putain d’irresponsable ! T’es prête à tout foutre en l’air pour des connards d’écolo qui pensent qu’à leur propre gueule, qu’à faire le scandale. J’agis comme ça parce que ça me fait chier d’me dire que j’ai sacrifié tout ça pour qu’au final tu refasses les mêmes conneries! » Ça sort mal, affreusement mal et complètement tordu, parce que le fond c’est pas ça. Là il à juste l’air du type qui cherche la reconnaissance dans le regard ou l’attitude de sa soeur, alors qu’au fond il sait que c’est pas ça qu’il veut lui faire comprendre.. Il sait pas vraiment ce qu’il veut qu’elle capte, mais certainement pas qu’elle lui doit quelque chose. Parce que si c’était à refaire, même si ça lui fait grincer les dents, il le referait.