happy is overrated (josh)

Un pas après l’autre, le jeune homme se rapprocha doucement de la vitrine, calant son grand skateboard contre le mur. Il n’aimait pas se sentir ainsi, fixer cet homme pour qui faire les courses n’avaient plus rien d’un supplice juste pour pouvoir passer quelques pauvres minutes dans la même pièce que lui. Il avait juste à basculer la tête en arrière afin de pouvoir voir le grand cerisier de Blossom Hills. Il se souvenait avoir longtemps joué avec son père près de cet arbre, les longues parties de cache-cache et les rires à gorge déployée qu’entrainait chaque jeu que son géniteur créait spécialement pour lui. Cela faisait bien longtemps qu’il n’avait plus eu de pareils moments avec lui. Il n’était plus un enfant après tout, c’était normal. Mais était-il un adulte pour autant, il n’était même pas capable de s’occuper de lui-même, toujours aussi dépendant financièrement de ses parents. Fait qui n’était pas prêt de changer vu la tournure que prenait lentement son avenir ces temps-ci. Au-delà de ces souvenirs, Joshua n’est pas tant attaché à ce cerisier ou à ce qu’il représente, mais il mentirait s’il disait ne pas s’être déjà senti consolé parfois en y posant le regard. Il avait toujours vécu ici, Blossom Hills fut la ville qui abrita la naïveté de son enfance, ses émois d’adolescent et ses déboires de quasi adulte. Il n’avait jamais manqué de rien grâce à ses parents. Son père, propriétaire d’un spa, leur a permis de toujours vivre loin de besoin tandis que sa mère lui donnait tout l’amour et l’attention qu’il fallait. Etant femme au foyer, elle avait assez de temps à lui consacrer.

Quand il y pense, Joshua se demande encore pourquoi il a aussi mal tournée. Il se voit crier sur ses parents, les engueuler pour un oui et pour un non quand ils n’ont que de l’amour à lui offrir, leur claquer la porter au nez ou refuser de leur parler durant plusieurs jours de suite. Pourtant, il les aime. Ils sont ce qu’il a de plus précieux au monde mais, c’était peut-être très cliché, il a l’impression qu’ils ne le comprennent plus. Pourtant ils lui laissent tout passer, n’ont rien dit que les tatouages sont petit à petit venus épouser sa peau, quand il a changé complètement de style vestimentaire, quand il n’a pas voulu continuer ses études supérieur ni même essayer de se trouver un travail…Choyé et couvé dans sa position d’enfant unique.

Son enfance avait donc été des plus tranquilles, toujours de bonnes notes à rapporter à la maison et une bonne appréciation de ses professeurs. Et ça avait commencé à s’empirer au fil des années, plus il grandissait et moins il devenait attentif, se liant à des bande de voyous qui faisaient leur loi dans les couloirs. Au collège, ses amis commençaient à se trouver des copines et avoir moins de temps pour trainer entre pote. C’était le désert total pour lui, aucune fille ne l’intéressa jamais. Cela lui prit des mois pour se rendre compte qu’il ne regardait pas dans la bonne direction et il refusa ses penchants. Il voulait juste être normal et redevenir l’enfant qu’il avait toujours l’impression d’être intérieurement. Et les garçons commencèrent à défiler, dans sa vie et dans son lit. Tous plus différents les uns des les autres. Il n’a jamais su ce qu’il cherchait réellement. L’amour ? Superflu et niais. Il n’avait pas besoin de ça dans sa vie. Jamais son homosexualité ne fut abordée avec ses parents, dans sa tête, il y’a pas beaucoup trop de scénarios. Peut-être qu’ils ne l’aimeront plus et l’abandonneront…peut-être pas. Mais à quoi bon prendre le risque ? Peut-être que demain il aimera une fille et tout sera normal. Alors Joshua rit de sa stupidité, cela ne risque pas d’arriver compte tenu de la façon dont il dévore des yeux ce caissier, pensant être discret.