(hind) pêche

(BANG) Tu embrasses la joue de ton père, le front de ta mère. Tu souris. Tu t'installes à ta place habituelle, cette place que tu as depuis tes huit ans. Si l'on regarde d'un point de vue extérieur on pourrait dire quelle famille parfaite. Ces sourires. Cette complicité. Cette joie qui s'en dégage. Tu sais qu'au fond ce n'est pas si parfait. Les apparences sont trompeuses comme dirait les anciens de cette petite ville. La porte de l'entrée qui grince. Cette sensation dans tes oreilles qui te fais frémir. Insupportable ce bruit penses-tu. L'ambiance est devenue plus froide. Quand la petite tête de ton frère commence à se faire plus nette, tu sers les dents. Ton père se leva. Criant comme à son habitude. Tu étais où encore ? Et autres questions du même genre. Tous les jours c'était les même cris, les mêmes histoires. Tu avais l'impression que cette scène se répétait. Ce n'était pas bon de rester dans cette pièce. Tu t'éclipsais comme à chaque dispute. Dans ta chambre. Tu pouvais entendre les engueulades. Ta mère qui essaye avec toute son énergie de calmer les deux hommes de la maison.  Le mieux c'était de ne rien dire. Tu te faisais discrète dans cette situation. Après la pluie vient le beau temps non ?
Tu retrouvais ton aîné dans sa chambre. Tu es mal à l'aise, tu ne sais jamais quoi dire. Ni faire. Tu te met à côté de lui. "Tu devrais  essayer de l'écouter des fois" tu savais très bien que c'était peine perdu. Il te regardait avec sa tête qui voulait dire dégage Hind sinon je te frappe. Bon. Je te ramène à manger c'est bon il sorti un pffft. Comme réponse. Tu roulais des yeux. Merci grosse tête,  rapporte à manger maintenant. Tu souris. Tu savais qu'il n'allait pas rester longtemps en faisant ce silence trop pesant. C'était comme ça avec lui. Tu savais que vous étiez chiens et chats mais ca restait ton frère. Tu l'aimais. Il t'aimais à sa manière.

(POUF) On était samedi. Tu sortais chez toi. Comme à ton habitude. Tu remettais souvent tes cheveux en place. Ce tic qui t'énerve.Qui énerve les autres. Tu te baladais dans les rues de ta petite ville. Tu connaissais les coins, les recoins par coeur. Tu salues les passants que tu as l'habitude d'appeler voisins. Ou des clients que tu vois venir chaque jour chercher du poisson frais. Oui t'es la fille du couple de poissonniers. Ils pensent que tu pues le poisson. Mais non. Tu ne fais que la caisse de toute façon. Tu conseils. Tu leur souris. Tu les écoute. Ils viennent parler des ragots quotidiens. Tu aimes bien. C'est drôle ce que peuvent dire les gens. Tu avais emmener ton sac favoris du moment. Orange. Il fait beau. Tu profites toujours de ce beau temps pour te balader. Tu profites du jour où tu ne travailles pas. Souvent on entends. Oh c'est la fille qui travaille à la poissonnerie.  Tu crois qu'elle sent le poisson ? C'était comme ça qu'on te voyais. Tu le savais. Au début t'aimais pas. T'avais honte même. Mais tu t'en fiche. C'est la vie. Puis. Honnêtement. Tu aimais vendre des poissons. Hind. D'origine égyptienne. Enfant de poissonniers.

(BOOM) C'était un mercredi soir. Tu t'en rappelle bien. Tu venais de dire bonne soirée au dernier client. Tu fermais la boutique. Comme chaque mercredi. Tu devais nettoyer aussi. L'odeur. Tu étais habituée. Ca dégoûtait. Repoussait. Chaque personne qui essayait de te connaitre. Tu marchais seule.  Tu préférais travailler. Il fallait bien une heure pour nettoyer. Tu prenais les escaliers de l'arrière boutique pour te rendre à ton domicile familiale. Ils étaient tous assis. Silencieux. Le regard vide. Je vais partir Hind. Je vais devenir militaire. Disait-il. Depuis quand il voulait devenir militaire ? Il n'avait jamais fait référence à cet avenir là. Tu ne savais pas trop comment le prendre. Tu souris. Il avait l'air heureux. Ton père aussi. Tu voyais ta mère un peu plus triste. Tu souris. Je suis contente pour toi.  Au fond tu ne l'étais pas. Tu voyais ces sac par terre. Qui signifiaient qu'il partait. Vraiment. Tu avais mal quand même. Tu ne voulais pas laisser partir ton frère. Il te sourit. Embrassa ton front. Chuchotant un t'inquiète je reviens vite.

(OVER) Un an maintenant que ton frère était parti. Tu avais des nouvelles de temps en temps. A son départ. C'était vide. Tout était vide. Ta mère pleurait. Ton père lui regrettait son absence. Plus de cries à la maison. C'était calme. Tu avais pris l'habitude de son absence. C'était dur. Ca ne l'est plus. Il faut faire avec. C'était ce que tu te répétais. Toujours. Tu continuais de travailler avec tes parents. Tu ne sortais pas trop depuis qu'il était parti. Tu avais même arrêter les cours pour aider plus tes parents. Tu te faisais discrète. Comme d'habitude. Tu étais trop sage. C'était ce qu'une amie t'avais dit l'autre jour. Peut-être un peu trop naïve, trop gentille. Tu en savais rien. Mais cette discussion t'avais ouvert les yeux. Tu voulais changer. Etre plus sociable peut-être. Tu ne sais pas. Tu écoutais les conseils de ton amie. Elle était plus libre. Vivait la vie de bohème. Ca te plaisait de la voir. D'écoute ses histoires. Son vécue. Tu te disais. J'ai besoin de changement. Maintenant.